Formations préforestières

Sambuco-Salicion

Description

Dans le canton, les formations arbustives préforestières (Sambuco-Salicion) se rencontrent typiquement sous les lignes à haute tension qui traversent la forêt, où la végétation est régulièrement débroussaillée sur plusieurs mètres de large. Ce type de végétation est compris de manière différente par les botanistes et par les forestiers (la vision botanique (phytosociologique) et la vision des stations* forestières sont deux manières différentes d’étudier et de comprendre la végétation forestière. Pour plus de détails, voir l’encart sur le sujet dans la fiche des chênaies mésophiles ou hygrophiles).

Selon la vision botanique, il s'agit de groupements intra-forestiers mésophiles* de recolonisation forestière, qui sont typiquement présents dans les clairières et dans les zones de chablis*. C'est une végétation qui perdure une vingtaine d'années1, tout en évoluant naturellement vers une formation forestière – chênaies à charmes, hêtraies ou autres forêts selon la station* et la gestion – sauf en cas de nouvelles perturbations ou de rajeunissement artificiel. Les formations préforestières sont dépendantes de l'ombre apportée par les arbres alentour1 et se distinguent des lisières par leur emplacement au cœur des massifs, où l'intensité lumineuse et la température sont moins élevées1. Mis à part le noisetier (Corylus avellana ), les espèces* qui se développent dans les formations préforestières ne supportent pas le traitement en haies1 et ne sont pas (ou peu) présentes dans les formations buissonnantes

La végétation des formations préforestières est caractérisée par la dominance de grands buissons (noisetier – Corylus avellana1,2, saule marsault – Salix caprea2 et sureau noir – Sambucus nigra1) et de jeunes arbres d’essences à croissance rapide (bouleau pendant – Betula pendula1,3, frêne – Fraxinus excelsior3, tremble – Populus tremula1, 3), mesurant entre 3 et 10 mètres de haut1. La strate* herbacée est composée, dans les premières années, d’espèces* héliophiles* pionnières*. Elle peut être riche en espèces* rudérales*, telles que l’épilobe à petites fleurs (Epilobium parviflorum)2, la vergerette annuelle (Erigeron annuus)2 et le tussilage (Tussilago farfara)2. La ronce commune (Rubus fruticosus aggr.)3, la ronce bleuâtre (Rubus caesius)2 ou la ronce d’Arménie (Rubus armeniacus) sont souvent abondantes. Des espèces des ourlets eutrophes peuvent être présentes, comme l’alliaire officinale (Alliaria petiolata), l’eupatoire chanvrine (Eupatorium cannabinum), le liseron des haies (Calystegia sepium), le chérophylle penché (Chaerophyllum temulum), la laîche des forêts (Carex sylvatica) ou la benoîte commune (Geum urbanum).

Les groupements préforestiers sont également présents temporairement après certaines coupes forestières. Ils étaient plus fréquents lorsque les forêts étaient gérées selon le régime de la futaie régulière* (en relation avec les grandes coupes à blanc effectuées lors de la mise en œuvre du programme «chêne 2000»). Ils sont très rares dans le cadre d’une exploitation en futaie irrégulière* qui privilégie une gestion pérenne des forêts et un dosage fin de la lumière, sans réouvertures massives.

Selon la vision des stations* forestières, les formations préforestières ne sont pas pertinentes car il s’agit d’un sylvo-faciès* extrêmement temporaire. Ces formations doivent être analysées selon la végétation indicatrice*, qui laisse préfigurer le type de forêt qui va s’installer. En effet, à part les surfaces volontairement mises à nu régulièrement comme sous les lignes électriques, les formations préforestières correspondent à des stades temporaires de développement classique d’une jeune forêt (rajeunissement et, en partie, fourrés) où les arbres sont en concurrence avec la végétation herbacée et arbustive. C’est lors de ces stades que se constitue le mélange des espèces* arborées, sous l’influence de nombreux facteurs dont la station*, le stock grainier, la concurrence intra et inter-spécifique, la lumière ou encore la pression des ongulés, ainsi que les soins culturaux apportés à la forêt au regard des objectifs de gestion. Les espèces* rudérales* et pionnières* citées ci-dessus ne s’expriment ainsi que temporairement, suite à l’apport accru de lumière et, dans certains cas (grande surface mise à nu), à une modification du régime hydrique par une remontée de la nappe*.

Où observer

Sous les lignes haute tension en forêt, par exemple, dans les bois de Versoix (Versoix), vers Pré-Béroux, ou à Bois Chébé (Satigny).

Quand observer

En mars. quand les fleurs mellifères du saule marsault se déploient.

Profil

Surface en hectares
76
Pourcentage du canton occupé
0.27%
Humidité
Minimum Moyenne Maximum
2.9 2.9 3.1
Acidité
Minimum Moyenne Maximum
3 3.3 3.7
Richesse en nutriments
Minimum Moyenne Maximum
2.8 3 3.5
Granulométrie
Minimum Moyenne Maximum
3.9 3.9 4.1
Naturalité
Value
4

Le saviez-vous?

L’exploitation des forêts genevoises depuis le Moyen Age a grandement favorisé les chênes, en vue d’obtenir du bois de feu, de l’écorce pour le tannage des cuirs, ainsi que du bois de construction. Les forêts étaient exploitées en taillis, c’est-à-dire que les arbres étaient coupés près de leur base pour encourager la reprise de rejets depuis la souche, plus faciles à débiter en bois de feu. Ce traitement laissait peu de place aux formations pré forestières car les rejets* de souche repartent rapidement.

Valeur biologique

Les formations préforestières sont constituées par des espèces* végétales communes1. Néanmoins, leur présence au sein des massifs forestiers diversifie les structures et la flore*, ce qui est favorable à la faune; surtout lorsque les forêts alentour ont un sous-bois peu dense, comme c’est le cas de certaines chênaies mésophiles et hêtraies. De plus, les espèces* forestières recolonisent petit à petit la zone ouverte et se mélangent aux espèces* pionnières*, ce qui augmente temporairement la richesse spécifique de ces surfaces.

Le sureau (Sambucus nigra) et le saule marsault (Salix caprea), ainsi que diverses espèces* herbacées* de ce milieu, offrent des fleurs riches en nectar aux insectes. Le saule marsault est une plante hôte de la chenille du grand mars changeant (Apatura iris), un très beau papillon aux reflets bleutés, que l’on peut rencontrer dans les clairières et les lisières. Comme dans les formations buissonnantes, le muscardin (Muscardinus avellanarius) peut élire domicile dans les surfaces à végétation préforestière, où il trouve les buissons qu’il affectionne, dont le noisetier (Corylus avellana). Plus généralement, la densité de la végétation de ce milieu offre des abris pour la petite et la grande faune3.

Vulnérabilité et gestion

Sous les lignes à haute tension en forêt, la végétation est broyée tous les cinq à quinze ans4 sur plusieurs mètres de large, ce qui maintient potentiellement la présence des formations préforestières. A noter que, selon le mode et la fréquence du broyage, ce type d’entretien favorise les rejets* de souches de quelques essences (frêne, noisetier) très dynamiques, ce qui laisse peu de place au développement des espèces* pionnières*.

Autrement, cette végétation est également présente au sein des coupes forestières, dans les forêts exploitées selon un traitement régulier*. Ce type de traitement se distingue du traitement irrégulier* (ou jardinatoire) par le fait que le prélèvement final des arbres s’effectue simultanément sur une grande parcelle (plusieurs milliers de mètres carrés). L’élimination, ou du moins la forte réduction, de la strate* arborescente crée brusquement des conditions de luminosité et de chaleur élevées au sol et potentiellement une remontée de la nappe*. Les essences arbustives comme le noisetier, ou arborescentes comme le saule marsault, le bouleau pendant, le peuplier noir, le frêne et les érables, voire le pin sylvestre, profitent de ces conditions très favorables pour se développer plus rapidement que les essences forestières cibles comme les chênes et le charme. La régénération naturelle de la forêt est marquée par cette phase de développement riche en essences héliophiles* pionnières*. Dans le contexte de cette phase de développement de la jeune forêt, les interventions sylvicoles consisteront essentiellement à favoriser ponctuellement les semis* des essences arborescentes cibles, en fauchant ou en débroussaillant régulièrement (jusqu’à 2 fois par an en prime jeunesse). La détermination de la station* forestière permettra de préciser les essences les plus adaptées et, notamment, d’orienter le choix entre le chêne sessile ou le chêne pédonculé.

Aujourd’hui, le traitement régulier* n’est plus utilisé et la gestion forestière favorise le traitement en futaie*, qui consiste à intervenir de manière ciblée dans les massifs pour favoriser le développement de grands arbres, laissant peu de place aux stades préforestiers.

Cartographie

Dans la carte des milieux naturels du canton, les faciès de jeunes forêts sont classifiées en forêt alors que les espaces entretenus régulièrement sous les lignes à haute tension sont classés comme formation préforestière.

Dynamique

Fichier

Espèces

Flore vasculaire
Erable sycomore Acer pseudoplatanus
Alliaire officinale Alliaria petiolata
Laiche des forêts Carex sylvatica
Chérophylle penché Chaerophyllum temulum
Cornouiller sanguin Cornus sanguinea
Noisetier Corylus avellana
Epilobe à petites fleurs Epilobium parviflorum
Vergerette annuelle Erigeron annuus
Frêne Fraxinus excelsior
Géranium herbe à Robert Geranium robertianum
Benoîte des villes Geum urbanum
Lierre Hedera helix
Tremble Populus tremula
Chêne sessile Quercus petraea
Chêne pédonculé Quercus robur
Ronce bleuâtre Rubus caesius
Ronce commune Rubus fruticosus aggr.
Saule marsault Salix caprea
Sureau noir Sambucus nigra
Mammifères
Muscardin Muscardinus avellanarius
Hermine Mustela erminea
Oiseaux
Rossignol philomèle Luscinia megarhynchos
Fauvette à tête noire Sylvia atricapilla
Fauvette des jardins Sylvia borin
Reptiles
Lézard vert Lacerta bilineata
Lézard des murailles Podarcis muralis
Vipère aspic Vipera aspis
Lézard agile Lacerta agilis
Amphibiens
Sonneur à ventre jaune Bombina variegata
Orthoptères
Criquet des clairières Chrysochraon dispar
Gomphocère roux Gomphocerippus rufus
Phanéroptère porte-faux Phaneroptera falcata
Lépidoptères
Grand mars changeant Apatura iris
Carte géographique Araschnia levana
Azuré des coronilles Plebejus argyrognomon
Amaryllis Pyronia tithonus
Coléoptères terrestres
Petit capricorne Cerambyx scopolii
Cétoine dorée Cetonia aurata
Clyte bélier Clytus arietis
Plantes invasives
Ronce d’Arménie Rubus armeniacus
Solidage géant Solidago gigantea
Auteurs
Anne-Laure Maire, Stéphane Sciacca, Yves Bourguignon, Pascal Martin, Florian Mombrial, Patrice Prunier