Chênaies sèches

Quercion pubescenti-petraeae

Description

Les chênaies sèches correspondent à l’aile la plus xérophile* des chênaies. Ce sont des formations basses (de 7 à 15 m de haut), très peu représentées dans le canton et le plus souvent fragmentaires, qui se développent sur des terrains secs et ensoleillés1. Les chênaies sèches se distinguent notamment par la dominance des espèces* végétales xérothermophiles* et, parallèlement, par la rareté des espèces* mésophiles* communes dans les autres forêts de feuillus (chênaies mésophiles ou hygrophiles, hêtraies).

La carte cantonale des milieux regroupe au 1: 5’000e les deux variantes suivantes:

Où observer

A Bois Chébé (Satigny), une chênaie buissonnante s’est développée sur les falaises abruptes au-dessus du Rhône.

Quand observer

En mai-juin, pour apprécier la floraison du géranium sanguin.

Profil

Surface en hectares
0.7
Pourcentage du canton occupé
0.02%
Humidité
Minimum Moyenne Maximum
2.3 2.4 2.5
Acidité
Minimum Moyenne Maximum
3.3 3.4 3.5
Richesse en nutriments
Minimum Moyenne Maximum
2.3 2.4 2.5
Granulométrie
Minimum Moyenne Maximum
3.4 3.5 3.6
Naturalité
Value
4

Le saviez-vous?

La vipère aspic (Vipera aspis) est un animal à sang froid qui a besoin, pour réguler sa température, de s’exposer aux rayons du soleil. Sa température corporelle idéale, lui permettant d’être véritablement active, varie entre 30 et 32,5 °C en fonction de son état physiologique. C’est la raison pour laquelle elle affectionne les milieux secs. En hiver, pour se protéger du gel et des inondations, elle cherche des caches (crevasses, terriers de rongeurs) dans lesquelles elle se terrera pendant quatre à six mois, jusqu’au retour des beaux jours. En été, lors de grandes chaleurs, elle se dissimule sous les pierres ou cherche un peu de fraîcheur dans la végétation.

Valeur biologique

Les chênaies sèches sont l’objet d’un fort intérêt en matière de conservation. Ces forêts aux sous-bois lumineux et au sol superficiel et drainant hébergent une flore souvent menacée* sur le canton, en raison de la rareté de l’habitat*. Il est, par exemple, possible d’observer dans les chênaies sèches l’anthéric à fleurs de lis (Anthericum liliago), l’arabette tourette (Arabis turrita) ou la potentille des rochers (Potentilla rupestris) qui sont sur la Liste rouge des plantes menacées du canton2. Les chênaies sèches sont aussi un paradis pour les reptiles, comme le lézard vert (Lacerta bilineata) ou la vipère aspic (Vipera aspis), qui profitent de l’ensoleillement pour se réchauffer et de la richesse en structures de ce milieu*, souvent associé à des buissons et à des zones ouvertes. C’est également dans ces secteurs que de petites populations de cigales rouges (Tibicina haematodes) se maintiennent, procurant au promeneur une légère impression de Provence.

Vulnérabilité et gestion

Historique

A la lumière des informations historiques basées sur des relevés palynologiques*, la végétation zonale* naturelle du bassin genevois peut de manière générale être caractérisée comme de la hêtraie-chênaie dans laquelle le hêtre et le chêne coexistent pour former des peuplements mixtes5. A certains endroits, l’une ou l’autre essence domine à la faveur de conditions stationnelles* particulières (végétation azonale*), ce qui est le cas du chêne sessile dans les chênaies sèches. Le hêtre est absent en raison des épisodes de sécheresse extrême. Les chênaies sèches se développent dans des conditions édaphiques* (sols superficiels et drainants) et d’exposition particulières, ce qui en fait des milieux* forestiers rares dans le canton. Les conditions stationnelles* particulières et typiques des chênaies buissonnantes (EK39 et VD610) et des chênaies à gesse noircissante (EK41 et VD640a), ont notamment contribué à maintenir naturellement des forêts claires avec des quantités faibles, voire très faibles, de bois sur pied, et des conditions de luminosité favorisant le développement de strates* herbacée et arbustive xérophiles*.

Gestion sylvicole

Très minoritaires, souvent situées sur des pentes escarpées difficiles d’accès, les chênaies sèches ne font actuellement pas l’objet d’une gestion spécifique. Dans ces chênaies au sol sec, superficiel et peu productif, les enjeux de la protection de la nature dominent largement et les interventions sylvicoles s’orientent essentiellement vers la conservation d’une structure et d’une composition en essences typiques de la station*. De plus, les stations* relativement rares, tant au niveau cantonal que national, associées aux chênaies sèches correspondent à des conditions écologiques spécifiques, particulièrement propices au développement de forêts claires*. Les objectifs sylvicoles cibles consisteront à favoriser une strate* herbacée diversifiée, en maintenant un degré de couverture de la strate* arborescente entre 30 et 40%, ce qui correspond à un volume de bois sur pied* estimé à 100-120 m3/ha, tout en luttant contre l’embroussaillement (maximum 20 à 30% de la surface). Les interventions sylvicoles, lorsqu’elles sont nécessaires, devront être réalisées en privilégiant des éclaircies légères et fréquentes, de manière à exploiter au mieux les dynamiques naturelles de la végétation sans déstabiliser les peuplements ou risquer de provoquer des dépérissements dus à un changement d’environnement trop brutal dans ces conditions stationnelles* particulières.

Cartographie 

Les chênaies sèches couvrent de très petites surfaces à Genève, qui peuvent échapper à la cartographie. Une seule surface a été cartographiée jusqu’à présent.

Une forêt, deux visions

Les forêts peuvent être décrites de deux manières, correspondant à des visions différentes qui sont complémentaires pour comprendre la végétation forestière. Il existe, d’une part, la vision phytosociologique* (ou botanique) qui cherche à définir le milieu sur la base de la végétation actuelle. C’est sur cette vision de la végétation des forêts qu’est basée la cartographie des milieux* du canton. D’autre part, il existe la vision des stations* forestières qui cherche à identifier les conditions du biotope* et la végétation potentielle, en s’affranchissant de l'influence de la sylviculture sur la végétation observée. Ainsi, la cartographie des stations* se base sur l’inventaire de certaines espèces indicatrices* au sein des strates* herbacée et arbustive, sans inclure la strate* arborescente qui peut être influencée par la sylviculture. Cette approche décrit une station* forestière qui identifie la végétation forestière climacique*, potentiellement présente sans l'effet de la sylviculture, et qui reflète les conditions pédo-climatiques (climat, exposition, relief, sol). En revanche, la cartographie botanique considère l’ensemble des espèces présentes dans les strates* herbacée, arbustive et arborescente, cette dernière étant prépondérante pour déterminer l’association* rencontrée.

Les deux méthodes convergent souvent pour définir une même association*, auquel cas l’association* phytosociologique correspondra bien à la station* forestière, donc à l’expression naturelle de la station*. Par contre, lorsque la physionomie d’une forêt s’éloigne de l’expression naturelle de la station* en raison de la sylviculture*, on parlera de sylvo-faciès*.

Les listes d’espèces* proposées ici ont été établies en réunissant les deux visions.

Les chênaies sèches du canton ne représentent que quelques surfaces isolées, souvent en situation escarpée et difficiles d’accès, comme le long des berges du Rhône. Ces conditions topographiques particulières, associées à la faible productivité de ces forêts, laissent penser qu’elles n’ont pas subi, au cours des siècles passés, une sylviculture intensive visant à modifier la composition naturelle des espèces* arborescentes. Cela est d’ailleurs corroboré par la très forte concordance entre les relevés botaniques et stationnels*. En effet, les deux approches considèrent que ces forêts sont des chênaies buissonnantes et des chênaies à gesse noircissante; la végétation observée correspond donc à l’expression naturelle de la station*.

Dynamique

Fichier

Ecogramme

Fichier

Espèces

Flore vasculaire
Laîche des montagnes Carex montana
Fétuque à feuilles de deux sortes Festuca heterophylla
Géranium sanguin Geranium sanguineum
Epervière de Savoie Hieracium sabaudum
Hippocrépide émérus Hippocrepis emerus
Genévrier commun Juniperus communis
Gesse noire Lathyrus niger
Luzule de Forster Luzula forsteri
Mélampyre des prés Melampyrum pratense
Mélitte à feuilles de mélisse Melittis melissophyllum
Chêne sessile Quercus petraea
Tanaisie en corymbe Tanacetum corymbosum
Germandrée petit-chêne Teucrium chamaedrys
Germandrée des bois Teucrium scorodonia
Reptiles
Lézard vert Lacerta bilineata
Vipère aspic Vipera aspis
Orthoptères
Méconème fragile Meconema meridionale
Grillon des bois Nemobius sylvestris
Decticelle cendrée Pholidoptera griseoaptera
Lépidoptères
Silène Brintesia circe
Thècle du chêne Neozephyrus quercus
Grande tortue Nymphalis polychloros
Thècle de l’yeuse Satyrium ilicis
Coléoptères terrestres
Calosoma inquisitor
Auteurs
Sophie Pasche, Stéphane Sciacca, Anne-Laure Maire, Yves Bourguignon, Pascal Martin, Florian Mombrial, Patrice Prunier